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Les eaux de process

Pour un fonctionnement optimal, un générateur de chauffage central à eau chaude (chaudière gaz, pompe à chaleur, …) et son circuit auxiliaire nécessitent une eau propre et de qualité compatible avec le contact aux métaux (acier, inox, cuivre, aluminium, ...).

La qualité de l’eau dépend de paramètres spécifiques tels que:

  • Le pH : niveau d’acidité ou d’alcalinité de l’eau
  • La dureté TH : teneur en calcaire dissous
  • La conductivité : approximation de sa minéralisation totale
  • Le taux de fer, chlorures, sulfates, ...
  • Présence de particules abrasives en suspension dans l’eau

L’eau potable non traitée peut être utilisée pour remplir les circuits de chauffage seulement dans certaines limites. La durée de vie des installations d’eau chaude et de toute l’installation de chauffage dépend énormément des caractéristiques physico-chimiques de l’eau utilisée. Le traitement approprié de l'eau d'alimentation est une des opérations importantes de maintenance du système.
Des qualités d’eau inadaptées peuvent entraîner la formation de tartre et de corrosion. Par conséquent, il est primordial de porter une attention toute particulière à la qualité, au traitement et surtout au contrôle continu de l’eau. C'est un facteur essentiel garantissant un fonctionnement sans panne ainsi que la disponibilité, la durée de vie et la rentabilité de l’installation de chauffage.

Entartrage et corrosion des circuits de chauffage

tuyaux

Au fil du temps, l'entartrage des circuits entraînent l'obstruction partielle ou totale du réseau de chauffage, et par la suite, la corrosion de certains éléments notamment en acier. Les origines de ces deux phénomènes sont nombreuses et diverses:

  • La qualité physico-chimique de l'eau utilisée, comme le pH, la dureté (teneur en calcaire dissous), la conductivité (approximation de sa minéralisation totale), les taux de fer/chlorures/ sulfates, la présence de particules abrasives en suspension (silice).
  • La calamine couvrant à l'origine les faces internes des tubes et tôles d'acier assemblées pour former le circuit de chauffage.
  • Les résidus provenant des raccords de liaison mécaniques ou soudés des tubes, sont à l'origine de divers déchets (morceaux de filasse, métal d'apport de soudure autogène ou de soudo-brasure, particules métalliques, ...).
  • La corrosion, réaction d'oxydation, qui a lieu entre l'oxygène de l'eau et les parties métalliques de l'installation, décompose l'acier en oxydes ferreux et ferriques, insolubles se déposant sous forme de boue dans l'installation.
  • Les interactions entre les différents métaux employés dans l'installation peuvent aggraver la corrosion en provoquant un phénomène de pile électrochimique.
  • La typologie et la température des installations pouvant entraîner la prolifération de bactéries (ferrobactéries thermorésistantes) qui aggravent le processus de corrosion.

Lorsque le niveau d'entartrage est assez important, certains dysfonctionnements apparaissent sur le réseau tels que:

  • Des surchauffes locales de la chaudière se traduisant par l'éclatement de parties métalliques dépassant les limites d'élasticité. En effet, la température de la paroi chauffée (côté eau) est de plus en plus élevée quand l'épaisseur de tartre carbonaté calcique augmente (voir schéma 1).
  • Une baisse de rendement des équipements de transfert thermique (température de confort dans les locaux concernés difficilement atteinte). La perte de température est proportionnelle à l'épaisseur du dépôt (voir schéma 2).
  • Les radiateurs sont froids dans les parties basses, et les utilisateurs doivent les purger fréquemment pour évacuer les gaz qui s'accumulent en partie haute.
  • Des fuites d'eau apparaissent sur les faces externes des radiateurs en acier, et de fréquents appoints d'eau sont nécessaires au niveau d'un chauffage individuel. Des écoulements d'eau se produisent même parfois au niveau du groupe de sécurité de la chaudière.
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Schéma 1: La température croît très rapidement quand l'épaisseur de tartre augmente au niveau de la chaudière Schéma 2: La température décroît très rapidement quand l'épaisseur de tartre augmente au niveau des radiateurs

Traitement préventif

boiler
  • Nettoyer et rincer impérativement l'installation lors des essais de mise en pression afin d'éliminer la calamine et les résidus générateurs de boues.
  • S'assurer que l'eau de remplissage et d'appoint est adoucie, voire désionisée, afin de réduire sa conductivité et d'exclure la précipitation de composés minéraux.
  • Dans les circuits « tout acier », ajouter des produits à base de soude, d'orthophosphate de sodium et de carbonate de sodium pour rester dans le domaine de passivité du métal. Prévoir aussi des inhibiteurs de corrosion, des séquestrants d'ions alcalino-terreux, des réducteurs d'oxygène et des produits de suspension-dispersion de boues.
  • Mettre en place un compteur volumétrique sur l'eau d'appoint, ce qui permet d'évaluer la quantité d'eau ajoutée et de produit de traitement nécessaire.

Traitement curatif

boiler
  • Eliminer les boues en circulation par la mise en place de pots à boues, filtres à cartouches ou appareils cycloniques avec, éventuellement, des aimants pour fixer les particules ferromagnétiques.
  • Eliminer dans certains cas, les dépôts durs d'oxydes de fer en les remettant en circulation grâce à des additifs spécifiques (attention, certaines pompes supportent mal le passage des résidus abrasifs).
  • Faire en sorte que les boues et les dépôts ne se reforment pas.
  • Nettoyer et rincer le circuit avant sa remise en service.
  • Vérifier la bonne qualité de l'eau de circulation et d'appoint, et si nécessaire la traiter, dans le respect de la réglementation.

Caractéristiques physico-chimiques optimales pour une eau de chauffage

  • Eau de remplissage et d'appoint:
    Paramètres Unité Valeur limite
    Dureté totale (TH)(1)°f< 0,5
    Conductivité(2)µs/cm< 100
    pH(3)6 à 8,5
    Chlorures (Cl)(4)mg/l< 250
    Sulfates (SO42-)(4)mg/l< 250
    Oxygène (O2)(5)mg/l< 0,1
    Teneur totale en carbone organique (TOC)(6)mg/l< 2
    Indice permanganate(7)mg/l< 9
    Métaux(8)
    Cuivremg/l< 0,1
    Fer totalmg/l< 0,2
    Zincmg/l< 0,5
  • Eau de circulation:
    Paramètres Unité Valeur limite
    Dureté totale (TH)(1)°f< 0,5
    Conductivité(2)µs/cm< 180
    pH(3)8,2 à 10
    Chlorures (Cl)(4)mg/l< 30
    Sulfates (SO42-)(4)mg/l< 50
    Oxygène (O2)(5)mg/l< 0,1
    Teneur totale en carbone organique (TOC)(6)mg/l< 30
    Titre alcalin (TA)(9)°f5 à 15
    Titre alcalimétrique complet (TAC)(9)°f20 + TA
    Orthophosphates (PO43-)(10)mg/l5 à 30
    Métaux(8)
    Cuivremg/l< 0,2
    Fer totalmg/l< 0,5
    Zincmg/l< 5
    Silicemg/l< 20
    Matières en suspension (MES)(11)mg/l< 150
    1. La dureté totale est un indicateur de la minéralisation de l'eau qui prend en compte notamment les teneurs en calcium et en magnésium de l'eau, mesurée par le titre hydrotimétrique en degré français (°f). Les eaux dures (eaux calcaires ou magnésiennes) laissent déposer beaucoup de tartre et ont une dureté totale supérieure à 30 °f. En revanche, les eaux douces (eaux faiblement minéralisées) ont une dureté totale inférieure à 20 °f. Une eau très douce et dont le pH est faible (acide) peut entraîner dans les réseaux des phénomènes de corrosion (rouille), l'eau est alors qualifiée d'agressive. Une eau dure aura pour inconvénient un fort entartrage des canalisations et du matériel. L'eau de remplissage et d'appoint doit être adoucie.
    2. La conductivité représente la minéralisation d'une eau. Plus une eau contient de sels minéraux, plus sa conductivité est grande. Son unité est le µS/cm. En dessous de 180 µS/cm, une eau est considérée comme peu minéralisée, elle est alors agressive. Au-dessus de 180 µS/cm, une eau est considérée comme fortement minéralisée, elle est alors entartrante. Des valeurs plus élevées peuvent être envisagées lors d'utilisation d'agents de traitement dans les circuits de chauffage.
    3. Après une période d'exploitation de quelques semaines, le pH se stabilise entre les valeurs indiquées dans le tableau, selon l'alcalinité propre aux conditions d'exploitation du système de chauffage. Un premier contrôle du pH doit être réalisé au bout de 2 à 3 mois, afin d'apporter les corrections nécessaires tout en veillant, dans le cas d'installations composées d'éléments en aluminium, de ne pas se situer en dessous de 6,5 ou dépasser la valeur maximale de 8,5.
    4. Des teneurs élevées en chlorures ou en sulfates peuvent être considérablement réduites par une déminéralisation totale de l'eau.
    5. Des valeurs trop élevées en oxygène font apparaître généralement des phénomènes de corrosion active. Cette réaction étant très difficilement réversible, les oxydes ainsi formés vont se trouver en suspension sous forme de boue, ou sédimenter dans les parties basses de l’installation (dépôts d'oxydes métalliques s'accumulant dans les conduites et radiateurs, ...) ainsi que dans le circulateur, entraînant la plupart du temps des dysfonctionnements sur l'ensemble du réseau. Une bonne étanchéité des conduites doit absolument être surveillée, afin de réduire au maximum ce genre de perturbations.
    6. La mesure du carbone organique total ou COT donne une indication directe de la charge organique d'une eau. Ce paramètre permet de suivre l'évolution d'une pollution organique, et participe au contrôle de la qualité de l'eau. La présence de COT dans l'eau peut engendrer une prolifération de micro-organismes, et si sa teneur est trop importante, révéler l'existence de substances qui peuvent perturber la sécurité d'exploitation de l'installation.
    7. L’indice permanganate d'une eau correspond à la quantité d'oxygène exprimée en mg/l, cédée par l’ion permanganate et consommée par les matières oxydables contenues dans un litre d'eau. C’est une mesure conventionnelle de la contamination d’un échantillon d’eau par des matières organiques.
    8. L’entartrage se manifeste généralement par des dépôts de calcaire et de carbonate de magnésium sur la surface interne du circuit de chauffage. Les conséquences peuvent en être des dysfonctionnements au niveau du passage de la chaleur et de la puissance thermique. Il est dès lors important de bien connaître leur titre hydrotimétrique ou TH représentant leur concentration. D'autre part, l'accumulation dans le réseau d'oxydes métalliques risquent de former des dépôts poreux, et par suite, de donner lieu à ces phénomènes de corrosion sous dépôts, il convient donc de veiller à ce que la teneur des métaux (cuivre, fer et zinc) ne dépassent pas les valeurs indiquées. La concentration en silice doit être aussi limitée de façon à éviter la formation d'incrustations silicatées par réaction avec la dureté résiduelle de l'eau d'appoint, ce qui nécessite une eau suffisamment alcaline pour que la silice présente puisse être maintenue en solution.
    9. Le titre alcalimètrique ou TA exprime la teneur en hydroxyde (OH-), et en carbonate (CO32-) en solution dans l'eau.
      Remarque : si le pH de l’eau est < 8,35, le TA sera toujours égal à 0. Le titre alcalimètrique complet ou TAC donne la teneur en hydroxyde (OH-), en carbonate (CO32-), et en hydrogénocarbonate (HCO3-) en solution dans l'eau. Ces différents titres définissent le caractère plus ou moins entartrant d’une eau. L’unité de mesure employée pour l’expression de ces titres est le degré français ou °f.
    10. Les orthophosphates et polyphosphates sont depuis longtemps utilisés pour le traitement des eaux dures. Un polyphosphates est un minéral soluble qui agit comme un séquestrant si on le mélange à l’eau. La séquestration est la tendance à tenir en solution d’autres minéraux (comme le calcaire provoqué par le calcium et le magnésium). Les polyphosphates changent également la structure moléculaire du calcaire pour le faire passer d’une forme cubique à une forme sphérique qui empêche toute accumulation de ces molécules les unes sur les autres. Les polyphosphates ne sont pas uniquement destinés à lutter contre le calcaire mais ils contrôlent également la corrosion qui accompagne les applications en eau chaude. La présence dans l’eau des polyphosphates inhibe la formation du tartre (précipitation du calcaire) et forme une couche protectrice sur les surfaces métalliques réduisant ainsi la corrosion.D'autre par, ils maintiennent en suspension le fer dissous (jusqu’à 1 mg/l) prévenant son oxydation et tous les effets indésirables qui en résulteraient.
    11. Les matières en suspension (MES) renseignent sur le degré de saturation de l'eau de chauffage en particules insolubles. Il est important que les teneurs soient les plus faibles possible afin d'éviter :
      • d'une part, les phénomènes de sédimentation dans les différents éléments du réseau, sous forme de boues, dépôts minéraux et organiques, entraînant par la suite des problèmes de corrosion
      • d'autre part, l'érosion causée par la circulation de l'eau dans les conduites, frottement d'autant plus fort, que le fluide contient des matières en suspension.

Analyses sur les eaux de chauffage

boiler
  • Paramètres physico-chimiques:
  • Paramètres Norme
    pHNF T 90-008
    ConductivitéNF EN 27888
    Dureté totale (TH)NF T 90-003
    Titre alcalin (TA)NF EN ISO 9963-1
    Titre alcalimétrique complet (TAC)
    MESNF EN 872
    Oxygène dissous (O2)ISO/FDIS 17289
    Indice permanganateNF EN ISO 8467
    AmmoniumNF T 90-015
    ChloruresISO 10304-1
    Nitrates
    Nitrites
    Sulfates
    SulfitesRodier 8e édition
    Orthophosphates (PO43-)NF EN ISO 6878
    Silice (SiO2)NF T 90-007
    Aluminium (Al)ISO 11885
    Calcium (Ca)
    Cuivre (Cu)
    Fer (Fe)
    Magnésium (Mg)
    Sodium (Na)
    Zinc (Zn)
  • Paramètres organiques:
  • Paramètres Norme
    Teneur totale en carbone organique (TOC)ISO 8245
    Indice hydrocarbureISO 9377-2
  • Paramètres bactériologiques:
  • Paramètres Norme
    Légionelle(*)ISO 11731 et XPT 90-471
    Bactérie du ferMéthode interne
    Bactérie du soufre (sulfato-réductrice)Dérivée de ISO 6461/2

    (*) Principalement sur eau chaude sanitaire (ECS)